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Pluie d’idées au collège

Le collège Jean Rostand de Château-Thierry a décroché le Prix PEI (Programme d’Études Intégrées) des Collèges 2024-2025. Son projet environnemental allie résilience climatique et biodiversité.

Le 16 mai, dans la salle des délibérations du Conseil départemental de l’Aisne à Laon, les élèves du collège Jean Rostand de Château-Thierry ont marqué les esprits. Lauréats du Prix PEI des Collèges 2024-2025, ces dix collégiens de 3e ont présenté un projet ambitieux : prévenir les inondations de plus en plus fréquentes en participant au développement de la biodiversité dans leur établissement.

Porté depuis 2016 par Sciences Po Lille en partenariat avec le Département de l’Aisne, le Programme d’Études Intégrées propose aux élèves de travailler sur des problématiques citoyennes accompagnés d’étudiants en sciences politiques. Cette année, 38 élèves de quatre collèges du département ont planché sur le thème suivant : « Quel projet proposer pour répondre au changement global et agir, même modestement, en tant que citoyen ? ».

Au collège Jean Rostand, la question ne relevait pas de la fiction. Le 12 mai 2024, Château-Thierry a subi des pluies torrentielles. La Marne a débordé, les hauteurs ont ruisselé, et le collège a vu l’eau s’infiltrer par les plafonds, les bouches d’aération et une trappe d’évacuation. Les salles de mathématiques, envahies de boue, ont perdu leur mobilier, leurs manuels et leur électricité. Les pompiers sont intervenus, le collège a fermé le lundi suivant.

Ces événements ont motivé une réflexion approfondie sur les causes et les solutions. L’une d’elles tient à l’artificialisation des sols. Bétonné, pentu, entouré de routes et de parkings, le collège ne permet pas à l’eau de s’infiltrer. Un lotissement construit au-dessus, à 218 mètres d’altitude contre 200 pour l’établissement, a aggravé le ruissellement.

Encadrés par trois enseignants – Madame Anne Wernet, Madame Sabrina Leroy et Monsieur Nicolas Leforestier –, les élèves ont proposé plusieurs mesures : créer des zones de rétention d’eau, désimperméabiliser certaines surfaces, végétaliser les cours. Leur projet se veut écologique mais aussi éducatif, en intégrant la communauté scolaire à chaque étape.

L’approche repose sur trois temps : établir un diagnostic, réfléchir aux contraintes, puis proposer des solutions en concertation avec les acteurs locaux. Parmi eux, Monsieur Grégory Quintus, responsable des espaces verts de Château-Thierry, rencontré en mars, a guidé les élèves vers des techniques favorisant l’autonomie de la nature et limitant l’intervention humaine.

Le collège Jean Rostand est situé en REP (Réseau d’éducation prioritaire) et bénéficie de la politique de la ville. Certaines rénovations sont déjà engagées, notamment sur les toits. Mais le projet reste ambitieux et coûteux.

Il faudra donc faire appel à d’autres financements : État, Union européenne, communauté d’agglomération, fonds départementaux, voire financement participatif. Le projet devra aussi s’insérer dans la réglementation en vigueur, respecter le plan local d’urbanisme, éviter d’alourdir le travail des agents d’entretien et répondre à des contraintes sanitaires et d’usage.

L’entretien ne devra pas reposer sur l’intervention constante, mais sur un équilibre naturel. Les espèces végétales devront être locales, adaptées, non allergènes et choisies pour leur capacité à enrichir les sols appauvris par le bitume.

Dès le mois dernier, un potager a été mis en place, accompagné d’un club jardinage ouvert aux élèves sur le temps du midi. À terme, il proposera légumes et herbes aux personnels du collège. Les zones engazonnées évolueront en prairies mellifères, grâce à des espèces sauvages régionales, en lien avec Pariciflore, une association francilienne spécialisée dans la préservation de la flore locale.

Ces aménagements doivent également composer avec la réalité de la vie scolaire. Trois cours sont réservées à différents niveaux, un préau abrite les 5e, les professeurs d’EPS exigent un espace plat et bétonné pour le biathlon, et les CPE craignent les perturbations causées par les travaux : débris, surveillance, cohabitation des niveaux.

Si certaines contraintes restent à résoudre, ce projet met en lumière la capacité d’une jeunesse à transformer une catastrophe en opportunité. Les élèves n’ont pas seulement réfléchi à l’eau ou aux plantes : ils ont interrogé les usages, les limites budgétaires, les règles administratives et l’équilibre entre développement durable et quotidien scolaire.

À Château-Thierry, l’eau a coulé. Mais au collège Jean Rostand, ce sont les idées qui ont germé.

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